La nostalgie d’une certaine intelligence émotionnelle
« Téléphone Maison ! » : voici une phrase qui raisonne forcément quelque part en vous !
E.T., Œuvre universelle et blockbuster de 1982, s’est fait une place dans le cœur de chacun.
Ce n’est pas uniquement parce que le film se place sans arrêt à hauteur d’enfant – les lampes torches dans la nuit, l’homme au trousseau de clefs – , ou encore parce qu’il est truffé de références bibliques – le cœur rougeoyant d’E.T., la guérison des malades par l’imposition du doigt, la mort et la résurrection, et son affiche très « Chapelle Sixtine »… E.T. l’Extra-Terrestre est aussi un film simple, limpide et pur sur la relation.
Il y est question de lien à l’autre ; l’autre, cet étranger qui semble si loin de nous.
Le film de Steven Spielberg – dont on sait aujourd’hui qu’il parlait de la douloureuse expérience du divorce des parents du petit Steven – est surtout un film méta, en ce sens qu’il va souvent au-delà de la simple relation d’un petit garçon et d’un extra-terrestre.
Nous pouvons y voir beaucoup de concepts développés aujourd’hui dans la sphère professionnelle :
-
Les phases du deuil d’Elisabeth Kübler-Ross
E.T. permet à Elliot d’aller vers l’acceptation de la séparation de ses parents. E.T. n’est autre qu’une contraction d’Elliot et l’extra-terrestre confronte avec bienveillance le petit garçon aux 5 phases du deuil : déni, colère, négociation, dépression, acceptation.
-
La systémique comme outil de reconnaissance
Un système se met en place entre E.T. et Elliot. Les deux personnages deviennent interdépendants. Ce que ressent l’un est ressenti par l’autre. Dans un montage parallèle, le petit garçon et l’extra-terrestre vont ressentir la même ivresse alors que l’un a bu et l’autre pas. La communication au sens d’entrée en relation de ces deux êtres est totale. Ils sont différents mais ne font parfois qu’un. En ressentant des émotions communes, ces deux êtres sont capables de s’aider et de se reconnaître.
-
La mise en autonomie
Si à un moment donné cette relation est aidante, elle devient vers la fin annihilante. Et c’est alors pour Elliot le temps de l’autonomie. Comme dans toute relation d’aide – thérapeutique, managériale, coach, etc…- arrive le temps où le sujet a besoin de s’autonomiser. C’est pourquoi E.T. doit repartir chez lui et laisser Elliot se débrouiller seul.
-
Émergence d’une intelligence émotionnelle
Le film démontre que la différence vue avec des yeux innocents peut faire émerger la compréhension et le soutien. Il appelle une ouverture vers de belles émotions : empathie, humilité, bienveillance, reconnaissance de la différence et acceptation. Elliot aide E.T. à rentrer chez lui. E.T. aide Elliot à faire son deuil. Avec beaucoup de délicatesse, cette mise en relation ne cesse d’évoquer une intelligence émotionnelle qui supporte et qui soutient.
La société a bien changé depuis 1982. La technologie a envahi nos vies. Et pourtant, la notion d’intelligence émotionnelle n’a jamais été autant souhaité dans les sphères sociales et professionnelles. Si l’on est très connecté, l’autre est de moins en moins facilement « contacté » au sens réel et profond du terme. C’est pourquoi, E.T. est un plaisir à revoir. Un plaisir enfantin peut-être mais un plaisir assurément humain: aussi simple qu’un vélo qui s’envole dans la lune.
Pour preuve, la mode du retour des années 80 dans les séries et le cinéma (cf. Stranger things, reboot Indiana Jones, Mad Max, Rocky etc…) est le signe qu’on savait alors plus qu’aujourd’hui se « brancher » sur notre câble émotionnel et qu’il est peut-être temps de s’y remettre…

Claire Laugier Breton
Spécialiste des Ressources Humaines et de la Communication